Myopathie des ceintures de type R3, R4, R5 et R6 (sarcoglycanopathie)
Des maladies rares d'origine génétique qui touchent le muscle.
Elles se manifestent par une diminution progressive de la force des muscles du bassin, des cuisses (ceinture pelvienne) et des épaules (ceinture scapulaire).
Que sont les sarcoglycanopathies ?
Les sarcoglycanopathies ou myopathies des ceintures avec déficit en sarcoglycane ou myopathies des ceintures R3, R4, R5 et R6 (anciennement LGMD 2D, 2E, 2C et 2F) sont des maladies du muscle. Le tissu musculaire se transforme : petit à petit il devient dystrophique (d’où le nom de dystrophie musculaire des ceintures). Progressivement, certains muscles diminuent de volume et s'affaiblissent. Elles appartiennent au groupe des myopathies des ceintures (« Limb Girdle Muscular Dystrophy » en anglais ou LGMD).
Elles débutent en général dans l'enfance. Les formes les plus graves apparaissent dès l'âge de 3 à 5 ans, les formes plus modérées commençant après 10 ans (certaines peuvent commencer à se manifester jusqu'à l’âge de 40 ans).
Les muscles des cuisses et du bassin (ceinture pelvienne) et les muscles des épaules (ceinture scapulaire) deviennent de moins en moins forts, entrainant des difficultés pour monter les escaliers, se relever du sol, lever un bras… Les chutes deviennent fréquentes. Certains muscles peuvent paraître très musclés sans pour autant être particulièrement forts (pseudohypertrophie des mollets et macroglossie de la langue).
Une atteinte cardiaque de type cardiomyopathie et/ou une atteinte respiratoire sont parfois retrouvées dans la gamma-sarcoglycanopathie (LGMD R5), la bêta-sarcoglycanopathie (LGMD R4) et la delta-sarcoglycanopathie (LGMD R6).
On les retrouve dans plusieurs populations de par le monde, avec une fréquence plus ou moins importante :
- L’alpha-sarcoglycanopathie ou LGMD R3 est disséminée dans le monde entier, même si on la retrouve plus fréquemment dans les familles d'origine caucasienne.
- La bêta-sarcoglycanopathie ou LGMD R4 est particulièrement répandue dans les populations d'origine caucasienne, ainsi que dans la communauté amish aux États-Unis et au Maghreb.
- La gamma-sarcoglycanopathie ou LGMD R5 est particulièrement répandue dans le bassin méditérranéen et chez les populations tziganes résidant en Europe.
- La delta-sarcoglycanopathie ou LGMD R6 n'a été jusqu'à présent décrite que dans 7 familles (cinq d'origine brésilienne, une d’origine turque et une italienne).
À quoi sont-elles dues ?
À quoi les myopathies des ceintures avec déficit en sarcoglycane sont-elles dues ?
Les myopathies des ceintures R3, R4, R5 et R6 (ou dystrophies musculaires des ceintures R3, R4, R5 et R6 ou sarcoglycanopathies) sont dues à des anomalies dans les gènes qui codent les sarcolgycanes : l'alpha-sarcoglycane pour la LGMD R3, le bêta-sarcoglycane pour la LGMD R4, la gamma-sarcoglycane pour la LGMD R5 et le delta-sarcoglycane pour la LGMD R6.
Les sarcoglycanes interagissent ensemble pour stabiliser la membrane de la cellule musculaire lors de la contractions du muscle.
Que peut-on faire ?
La prise en charge vise essentiellement à améliorer le confort de vie des personnes atteintes de myopathie des ceintures avec déficit en sarcoglycane et à en prévenir les complications, en particulier au niveau des muscles et des articulations.
- Le diagnostic et la prise en charge d'une myopathie des ceintures avec déficit en sarcoglycane se conçoivent au mieux dans le cadre de consultations pluridisciplinaires spécialisées dans les maladies neuromusculaires.
- Une surveillance annuelle est recommandée pour faire un bilan musculaire, orthopédique, cardiaque et respiratoire.
- La prise en charge orthopédique (kinésithérapie, appareillage) doit être précoce, régulière et adaptée à chaque situation individuelle. Elle permet de lutter contre les conséquences néfastes de la maladie, en maintenant, notamment, la souplesse des articulations.
- Des aides techniques (canne, téléphone main libre, pince à long manche, support de bras...) aident, le cas échéant, à réaliser les gestes de la vie quotidienne que la gêne musculaire rend difficiles ou impossibles. L’utilisation d’un fauteuil roulant permet de conserver son autonomie de déplacement.
- Un suivi cardiologique régulier permet de mettre en route un traitement adapté au cas où des signes cardiaques éventuels sont détectés par les examens médicaux. Le traitement de la cardiomyopathie repose sur les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, voire des bêta-bloquants.
- Une assistance respiratoire est parfois nécessaire en cas d'insuffisance respiratoire chronique.
C'est une maladie génétique qui se transmet sur le mode autosomique récessif. Le conseil génétique permet d'informer et d'accompagner une personne, ou une famille, confrontée au risque de développer ou de transmettre cette maladie.
Comment fait-on le diagnostic ?
Le diagnostic clinique est basé sur la répartition du déficit musculaire, son évolutivité et le mode de transmission génétique de la maladie.
Il est complété par des examens (prise de sang, scanner ou IRM musculaire, électromyogramme, biopsie musculaire) qui visent à préciser le type d'atteinte des muscles et sa topographie.
- Le bilan biologique (prise de sang) met en évidence une concentration sanguine de certaines enzymes musculaires telles que la créatine kinase ou créatine phospho-kinase (CPK) franchement élevée.
- L'électromyogramme révèle que l'atteinte est d'origine musculaire (tracé myopathique).
- L’observation au microscope d'un fragment de muscle (prélevé par biopsie musculaire) permet de mettre en évidence les altérations dystrophiques du muscle (zones de nécrose-régénération) et d’étudier la présence au niveau de la membrane musculaire des 4 sarcoglycanes (immunocytochimie).
- L'analyse des sarcoglycanes par Western blot objective encore plus précisément la diminution, voire l’absence, de tel ou tel sarcoglycane dans le fragment de muscle étudié.
- Une prise de sang permet, à partir de l'ADN des globules blancs, de procéder à un test génétique à la recherche d’une anomalie d’un ou plusieurs gènes codant les sarcoglycanes.
Où en est la recherche dans les myopathies des ceintures ?
La recherche sur les myopathies des ceintures est particulièrement active que ce soit dans le domaine de la découverte de nouveaux gènes ou celui de l'exploration de pistes thérapeutiques.
À l'occasion de la journée internationale de sensibilisation aux myopathies des ceintures, le 30 septembre 2018, deux chercheurs de l'Institut de Biothérapies travaillant sur les myopathies des ceintures, Isabelle Richard à Généthon et Xavier Nissan à I-Stem, ont fait le point sur la recherche dans ces maladies.
Quelques chiffres…
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Congrès internationaux et ateliers de travail
Plusieurs congrès internationaux sur la recherche dans les maladies neuromusculaires sont régulièrement organisés :
- Myology, le congrès international sur la myologie, organisé par l'AFM-Téléthon (la dernière édition a eu lieu du 12 au 15 septembre 2022 à Nice),
- le congrès international annuel de la World Muscles Society, congrès de références sur les maladies neuromusculaires…
Ils permettent de favoriser les échanges entre tous les acteurs impliqués -chercheurs issus de laboratoires de recherche fondamentale, cliniciens des centres spécialisées dans la prise en charge de ces maladies, représentants de l'industrie pharmaceutique…- et de présenter les progrès réalisés dans le développement des thérapies innovantes dans les maladies neuromusculaires (thérapie génique, saut d’exon, pharmacogénétique…) dont les myopathies des ceintures.
Lors du congrès Myology2019, Madhuri Hegde (Waltham, USA) qui travaille sur la compréhension des origines génétiques des dystrophies musculaires des ceintures a présentée les résultats d’une étude menée sur plus de 5 000 patients.
En août 2019, s'est tenu pour la première fois une conférence américaine dédiée aux dystrophies musculaires des ceintures, à Chicago.
- Généthon a organisé à Paris en novembre 2016 le premier colloque consacré à la préparation des essais cliniques dans les sarcoglycanopathies. Médecins et chercheurs du monde entier ont établi une feuille de route pour anticiper au mieux la mise en place de futurs essais cliniques. Plusieurs études de suivi à long terme des patients atteints de sarcoglycanopathies (une centaine de patients suivis dans les consultations neuromusculaires en région parisienne, 172 patients italiens, 134 patients allemands…) ont été présentées ainsi qu’un panorama des pistes thérapeutiques à l’étude dans ces maladies.
Les chercheurs et cliniciens impliqués dans les myopathies des ceintures se réunissent aussi lors d'ateliers de travail plus restreints, rassemblant une vingtaines d'experts autour d'une thématique pour favoriser les échanges et mettre en place des collaborations. Dans le domaine des myopathies des ceintures, des ateliers sont régulièrement organisés par l'European Neuromuscular Centre (ENMC).
Améliorer les connaissances sur les myopathies des ceintures
- Depuis la découverte du gène de la calpaïne 3 en 1995 par l'équipe d'Isabelle Richard à Généthon, plus de 30 gènes différents ont été identifiés dans les myopathies des ceintures. Les médecins découvrent petit à petit que certains de ces gènes sont aussi impliqués dans d'autres formes de maladies neuromusculaires, notamment dans plusieurs formes de dystrophies musculaires congénitales, de myopathies distales ou de myopathies myofibrillaires.
- Face à cette complexité génétique et clinique grandissante, un atelier de travail organisé par l’ENMC et réunissant les experts du monde entier travaillant sur les myopathies des ceintures a permis de faire le point sur la classification et les différentes formes décrites de myopathies des ceintures. À la suite de cette réunion, une nouvelle classification a été proposée, comprenant 5 formes de myopathies des ceintures dominantes et 24 formes de myopathies des ceintures récessives.
- Plusieurs études observationnelles et bases de données sont en cours pour mieux décrire les différentes formes de myopathies des ceintures. Ces études apportent des données plus spécifiques sur l'évolution de chacune des formes de myopathies des ceintures sur lesquelles s’appuyer pour de futurs essais cliniques.
Les pistes thérapeutiques
Les chercheurs explorent plusieurs stratégies afin d'agir sur le mécanisme pathologique à différents niveaux.
- La thérapie génique consiste à insérer, dans les cellules de la personne malade, un "gène-médicament". Les essais cliniques de thérapie génique dans les myopathies des ceintures commencent à se multiplier tandis que des premiers résultats arrivent et que les approches se diversifient.
Plusieurs essais de thérapie génique sont en cours dans les myopathies des ceintures. Des résultats préliminaires encourageants d'un essai dans la LGMD R4 (gène de la β-sarcoglycane) ont été annoncés en mars 2019, suivis, en mai 2019, par les résultats positifs d'un essai dans la LGMD R3 (gène de l’α-sarcoglycane). Un troisième essai est en cours dans la LGMD R2 (gène de la dysferline).
D'autres études sont en cours sur des modèles expérimentaux, dans des laboratoires de recherche, dont le Généthon où l’équipe d’Isabelle Richard développe plusieurs approches de thérapie génique dans les myopathies des ceintures dont dans la LGMD R9 (gène FKRP), dans la gamma-sarcoglycanopathie (LGMDR5) et dans la calpaïnopathie (LGMD R1).
Pour en savoir plus : un article pour comprendre la thérapie génique avec un focus sur les travaux en cours à Généthon sur le blog du groupe d'intérêt "Myopathies des Ceintures" de l'AFM-Téléthon
- La thérapie cellulaire vise à réparer les muscles atteints en administrant à la personne malade ses propres cellules souches, préalablement corrigées par thérapie génique. Des chercheurs ont pu corriger des anomalies dans le gène de la calpaïne 3 dans des cellules souches pluripotentes induites (iPS) provenant de personnes atteintes de LGMD R1, grâce à la technique CRISPR/Cas9.
- Une approche pharmacologique vise à ralentir l’évolution de la maladie. Plusieurs candidats médicaments sont à l’essai : le lisinopril, associé au coenzyme Q10, le PF-06252616...
Depuis 2015, le laboratoire I-stem travaille sur des cellules modèles de myopathies des ceintures pour identifier des candidats-médicaments parmi des molécules déjà connues.
Voir les Avancées dans les myopathies des ceintures
Pour aller plus loin
- Aller sur le blog du groupe d'intérêt "Myopathies des Ceintures" de l'AFM-Téléthon
- Voir les publications dans la base de données bibliographiques PubMed (en anglais)
- Voir les essais cliniques répertoriés sur le site ClinicalTrials.gov (en anglais)
Comment évoluent-elles ?
Les sarcoglycanopathies évoluent de façon extrêmement variable, même parmi les membres d'une même famille.
L'atteinte musculaire s'étend progressivement vers les muscles du tronc (dos, poitrine, ventre) et les muscles distaux (muscles des membres éloignés du tronc : jambes et pieds, bras et mains) qui s'affaiblissent. La perte de la force musculaire s'accompagne d'un enraidissement des muscles et des articulations et peut entraîner, en l’absence de prise en charge orthopédique, des déformations articulaires.
Dans les formes les plus graves, les personnes perdent la marche avant 30 ans. Une atteinte cardiaque et/ou respiratoire affecte l'espérance de vie.
Dans les formes les plus modérées, l'espérance de vie n'est pas réduite et les personnes ne perdent pas la marche.