Maladie de Charcot-Marie-Tooth
La maladie de Charcot-Marie-Tooth (ou CMT) regroupe un ensemble de maladies génétiques qui touchent les nerfs des jambes et des bras. La prise en charge médicale limite les difficultés rencontrées dans la vie quotidienne (troubles de la marche et de l’équilibre, douleurs…) et ralentit l’évolution à long terme de la maladie. Très active et diversifiée, la recherche vise à identifier de nouveaux gènes en cause, tester des candidats-médicaments, découvrir de nouvelles pistes thérapeutiques, faciliter le diagnostic…
Qu'est-ce que la maladie de Charcot-Marie-Tooth ?
La maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT) est une neuropathie sensitivomotrice héréditaire : une maladie du nerf périphérique (neuropathie) qui entraine une diminution de la force musculaire et de la sensibilité (sensitivomotrice) qui peut se transmettre des parents aux enfants par les gènes (héréditaire), en anglais hereditary motor and sensory neuropathies, abrégé en HMSN. Elle est aussi appelée neuropathie de type Charcot-Marie-Tooth.
Le syndrome de Déjerine-Sottas désigne une forme particulièrement sévère de la maladie, qui se manifeste dès la naissance ou la petite enfance.
La maladie de Charcot-Marie-Tooth toucherait entre 30 000 et 50 000 personnes en France (soit 1 personne atteinte sur 2 500).
À noter qu'il existe une maladie de Charcot, à ne pas confondre avec la maladie de Charcot-Marie-Tooth.Il s'agit de deux maladies distinctes, qui se manifestent et évoluent de manière très différente l'une de l'autre. Pour en savoir plus sur la maladie de Charcot (ou sclérose latérale amyotrophique), vous pouvez consultez le site internet de l'ARSLA (Association pour la Recherche sur la Sclérose latérale amyotrophique et autres maladies du motoneurone).
À quoi est-elle due ?
Plus de 80 gènes impliqués dans l'apparition et la transmission de la maladie de Charcot-Marie-Tooth ont été identifiés.
À chaque gène, correspond une forme distincte de la maladie. Afin de rendre compte de la grande variété génétique rencontrée dans la CMT et d'organiser les différents formes de CMT, les médecins et chercheurs ont mis au point une classification selon 3 critères :
- la nature de l'atteinte du nerf périphérique, déterminée d'après les vitesses de conduction nerveuse : forme axonale (vitesse de conduction nerveuse > 40 ms); forme démyélinisante (vitesse de conduction nerveuse < 35 m/s); forme intermédiaire (vitesse de conduction nerveuse entre 25 m/s et 45 m/s) ;
- le mode de transmission génétique : autosomique dominant, autosomique récessif et lié à l'X ;
- l'anomalie génétique en cause.
Selon ces critères, il existe 6 grands types de CMT : CMT1, CMT2, CMT4, CMTX, DI-CMT et RI-CMT (historiquement, l'appellation CMT3 a été utilisée, mais a aujourd'hui disparu, pour des raisons complexes). Ces 5 grands types sont divisés en sous-types (1A, 1B, 1C..., 2A, 2B...). Chacun de ces sous-types correspond à une anomalie génétique touchant la fabrication d'une protéine donnée.
De nouveaux gènes en lien avec la maladie de Charcot-Marie-Tooth sont découverts chaque année. Cette classification continue donc d'évoluer.
les Avancées dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth
Ces anomalies génétiques entrainent une atteinte des nerfs périphériques, en particulier ceux des jambes et des bras.
Les nerfs périphériques relient les muscles et les organes sensoriels de la peau et des articulations au système nerveux central. Les informations qu'ils transmettent entre les muscles, les récepteurs de la peau, les récepteurs articulaires et le cerveau sont nécessaires aux mouvements, aux perceptions tactiles et douloureuses et au maintien de l'équilibre.
Dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth, l'atteinte des nerfs périphériques entraîne principalement un manque de force musculaire, des troubles de la sensibilité des extrémités des membres (pieds, mains) et des troubles de l'équilibre.
Que peut-on faire ?
La prise en charge orthopédique joue un rôle essentiel dans le suivi médical des personnes atteintes de maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT). Associée à une activité physique régulière d’intensité modérée, elle permet de ralentir l’évolution à long terme de la maladie en l'absence de traitement permettant de guérir.
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- Le diagnostic et la prise en charge d'une CMT se conçoivent au mieux dans le cadre de consultations pluridisciplinaires spécialisées dans les maladies neuromusculaires.
- La pratique régulière d'une activité sportive modérée adaptée aux capacités musculaires (natation, gymnastique aquatique, vélo d'appartement, vélo elliptique....) améliore la force musculaire et l'endurance. Il a été montré qu'elle peut, en prévenant la désadaptation à l'effort, diminuer les sensations de fatigue et de douleur chez les personnes atteintes de CMT.
- La prise en charge orthopédique comprend la kinésithérapie, qui doit être précoce, régulière et personnalisée, ainsi que l'appareillage. Elle permet de ralentir l’évolution de la maladie, notamment en maintenant la souplesse des articulations (la perte de la force musculaire peut entraîner des déformations articulaires).Des chaussures orthopédiques, des attelles, voire dans certains cas une intervention chirurgicale, peuvent être proposées pour compenser les difficultés à la marche.
- La prise en charge des douleurs varie en fonction de leurs causes (adaptations du programme de rééducation ou d'un appareillage dès que nécessaire, médicaments contre la douleur, relaxation… Il existe des centres spécialisés dans le traitement de la douleur chronique.
- Le conseil génétique permet d'informer et d'accompagner une personne, ou une famille, confrontée au risque de développer ou de transmettre cette maladie.
La carte d’urgences Maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT), mise en place par la filière FILNEMUS depuis juillet 2018, présente les recommandations importantes pour la sécurité et la prise en charge médicale d’urgence de la personne atteinte de CMT.
Le PNDS « Neuropathies héréditaires sensorimotrices de Charcot-Marie-Tooth » (protocole national de diagnostic et de soins) est publié sur le site de la Haute Autorité de Santé (HAS).
Comment évolue-t-elle ?
L’évolution reste extrêmement variable entre les différents types de CMT et y compris au sein d’une même famille : certaines personnes présentent peu ou pas de symptômes alors que d’autres ont une gêne fonctionnelle importante. Rien ne permet de prédire à quel rythme évoluera la maladie, ni la gravité de l'atteinte. Les formes commençant dans l'enfance ne s'aggravent pas plus rapidement.
L'évolution est en général lentement progressive, mais elle peut aussi se faire par poussées (notamment à l’adolescence).
Les formes sévères sont rares. En règle générale, le handicap est modéré et la marche reste le plus souvent possible. L'espérance de vie n’est pas affectée et il est possible de conserver une activité socio-professionnelle normale ou quasi-normale dans la plupart des cas.
Comment fait-on le diagnostic de CMT ?
Le diagnostic clinique est basé sur la mise en évidence d’un déficit moteur et parfois sensitif en rapport avec une atteinte du système nerveux périphérique.
L’examen électrophysiologique des nerfs, qui doit être systématique, permet de préciser le type de l’atteinte nerveuse. La mesure de la vitesse de conduction nerveuse permet en effet de distinguer une atteinte de la myéline, l’enveloppe qui entoure le prolongement de la cellule nerveuse (formes myéliniques ou CMT1 ou certaines CMT4) ou d’une atteinte primaire du neurone (formes axonales ou CMT2 ou certains CMT4).
Dans les CMT1 et dans certaines CMT4, c’est la gaine de myéline qui entoure le nerf qui est atteinte. L‘électromyogramme révèle une vitesse de conduction nerveuse diminuée (sans lien avec l’atteinte clinique).
Dans les CMT2 et dans certaines CMT4, c’est directement le nerf qui est atteint. L‘électromyogramme révèle une vitesse de conduction nerveuse plus ou moins augmentée.
L’identification du type électrique de l’atteinte nerveuse et du mode de transmission par l’étude de l’arbre généalogique permet ensuite de guider l’étude en biologie moléculaire. En effet, pour les formes de maladie de Charcot-Marie-Tooth dont le gène est connu, un diagnostic moléculaire est possible : à partir d’une prise de sang, on extrait l’ADN des globules blancs et on recherche l’anomalie génétique en cause.
Où en est la recherche dans la CMT ?
La France est très impliquée dans la recherche clinique sur la CMT, avec la mise en place dès 2005 d’un essai clinique de grande ampleur dans la CMT 1A, financé par l’AFM-Téléthon. Depuis cet essai, évaluant l’efficacité de l’acide ascorbique, d’autres essais ont eu lieu, notamment pour évaluer le PXT3003, un candidat-médicament développé dans la CMT 1A ou encore l'IFB-088, une molécule développée avec le soutien de l’AFM-Téléthon, testée avec succès sur des animaux modèles de CMT 1A et CMT 1B.
Un nouvel essai international auquel prend part la France (CHU de Nantes) a démarré en novembre 2024 avec l’inclusion du premier participant. Il s’agit de l’essai de phase 2 SYNAPSE-CMT qui évalue la sécurité d’utilisation, la tolérance et l’efficacité du NMD670, une molécule qui pourrait améliorer l’activation des muscles plus faiblement stimulés dans la CMT.
Une étude en cours en France
Une étude clinique est en cours dans la CMT 2A pour caractériser les conséquences moléculaires de la maladie sur un échantillon sanguin et identifier d'éventuelles cibles thérapeutiques ou marqueurs d'évolution de la maladie.
En Europe, aux États-Unis, au Japon... de nombreuses équipes travaillent sur l’identification des causes génétiques et la compréhension des mécanismes de chacun des sous-types de CMT, ainsi que sur la découverte et l'évaluation de nouvelles pistes thérapeutiques.
- Beaucoup d’espoirs se portent sur la thérapie génique et les médicaments antisens à ARN. Plusieurs équipes développent ces approches, avec des résultats encourageants chez l’animal.
- Une autre piste vise à rechercher des médicaments ou molécules déjà connus et commercialisés pour traiter d’autres maladies et qui agiraient sur des mécanismes en cause dans une ou plusieurs formes de CMT.
les Avancées dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth
Ces chercheurs et ces cliniciens spécialistes de la maladie de Charcot-Marie-Tooth se réunissent régulièrement lors congrès nationaux et internationaux consacrés aux maladies du nerf périphérique et/ou aux maladies neuromusculaires pour échanger sur l'avancement de leurs projets de recherche et mettre en place des collaborations : Congrès de Myology, Congrès annuel de la "Peripheral Nerve Society"... au niveau international ; congrès de l'association CMT-France, Journées annuelles de la Société Francophone du Nerf Périphérique (SFNP)... au niveau national.
Comment se manifeste la CMT ?
La maladie de Charcot-Marie-Tooth débute la plupart du temps dans l’enfance ou chez l’adulte jeune. Les premiers signes sont le plus souvent des troubles de la marche (retard à l’acquisition de la marche, chutes, déficit des muscles releveurs des pieds qui entraînent une démarche trébuchante- steppage-) et des déformations des pieds (pieds creux). Ils sont dus à une faiblesse musculaire distale, c’est-à-dire des extrémités des membres et une atrophie progressive, plus marquée aux jambes (atrophie musculaire péronière). Fatigabilité, troubles de l’équilibre et pénibilité de la station debout ou à la montée des escaliers sont des symptômes fréquents.
L’atteinte des mains est en général tardive, n’apparaissant qu’après plusieurs années d’évolution.
Une diminution de la sensibilité (au toucher, à la chaleur, au froid, à la douleur...) au niveau des pieds et des mains est aussi possible. Il est fréquent que des douleurs apparaissent chez les personnes atteintes de CMT.
Dans certaines formes, d’autres symptômes peuvent être présents : atteinte respiratoire, atteintes des cordes vocales, surdité, ulcères aux pieds.