Octobre Rose : et si on parlait dépistage ?
La campagne annuelle d'Octobre Rose met en lumière la nécessité du dépistage des cancers féminins. Mais pour les femmes en situation de handicap, notamment celles vivant avec une maladie neuromusculaire, accéder à des soins gynécologiques réguliers relève encore souvent du parcours du combattant... alors comment faire ?
Moins de dépistage chez les femmes en situation de handicap
Selon un rapport de la Haute autorité de santé publié en 2019, les femmes en situation de handicap, en particulier celles atteintes de handicaps moteurs, se font moins dépister du cancer que les autres. Les consultations gynécologiques sont également souvent considérées comme inaccessibles à cause d’obstacles logistiques : transports, transfert sur la table d’examen, absence de locaux adaptés.
Une étude Handigynéco, à laquelle l’AFM-Téléthon a participé, réalisée auprès de 1000 femmes en situation de handicap révèle encore que celles-ci sont trop souvent éloignées des dépistages, avec pour conséquence potentielles des taux de cancers du sein et du col de l'utérus plus élevés :
- 58 % seulement ont déclaré bénéficier d’un suivi gynécologique régulier et, parmi elles, 88 % se disent satisfaites de la prise en charge.
- 26 % n'ont jamais réalisé de frottis du col de l’utérus, et 85,7 % n'ont jamais eu de mammographie alors même que, pour les seules maladies neuromusculaires, l’autopalpation des seins est très difficile voire impossible.
Quand il est détecté tôt, le cancer du sein guérit dans 9 cas sur 10 (ameli.fr)
Des freins nombreux pour une consultation gynéco
La gêne de devoir consulter, une mauvaise expérience par le passé ou ne pas en voir la nécessité… sont des raisons qui expliquent que nombre de femmes en situation de handicap, et notamment celles atteintes d’une maladie neuromusculaire, hésitent à consulter un gynécologue ou une sage-femme. D'autres encore redoutent la douleur, la position inconfortable en raison de matériels d’examen non adaptés ou l'incompréhension de la part des professionnels de santé face à leurs spécificités liées au handicap. D’autres facteurs s’y ajoutent :
- l’accessibilité des établissements de santé, lesquels sont sous-équipés pour accueillir des femmes en fauteuil roulant ou rencontrant des difficultés à se déplacer ;
- le manque de formation des professionnels de santé aux besoins spécifiques de ces femmes, pour adapter la consultation et avoir les outils nécessaires à leur prise en charge ;
- la complexité et la durée des consultations, qui nécessitent parfois plus de temps et des équipements spécifiques (table gynécologique électrique, aide humaine pour les transferts), pas toujours disponibles.
L’AFM-Téléthon se mobilise !
Notamment à travers le Comité Parentalité des personnes en situation de handicap, l’AFM-Téléthon maintient une pression impérative sur les pouvoirs publics pour que les professionnels de santé continuent de se former aux spécificités du handicap. Son objectif est aussi que les infrastructures de santé soient repensées pour être accessibles, avec des équipements adaptés et des personnels sensibilisés.
Des initiatives qui commencent à changer la donne
Des dispositifs innovants, comme les consultations « HandiConsult » (au sein des hôpitaux) et « Handigynéco », se multiplient en France. Ces dernières sont portées par des sage-femmes formées aux besoins des femmes en situation de handicap, qui offrent une approche bienveillante et adaptée. Ces consultations sont généralement mises en place au sein d’établissements médico-sociaux et permettent de dépasser plusieurs obstacles, notamment en termes d’accessibilité et d’accompagnement humain et de temps pour répondre aux interrogations des patientes. Mais encore trop peu de femmes en bénéficient, soit par manque d’information, soit parce que ces consultations restent limitées géographiquement.
« Il peut être difficile de franchir la porte d'un cabinet gynécologique après des expériences négatives ou lorsque les difficultés physiques se cumulent. Pourtant, la prise en charge gynécologique, notamment à travers les dispositifs spécialisés comme "Handigynéco", peut véritablement faire la différence. »
Fabrice Boudinet, responsable Mission intimité, AFM-Téléthon
Le dépistage, un acte essentiel pour toutes
Le dépistage ne concerne pas uniquement les femmes ayant une vie sexuelle active. Le cancer du sein et les cancers gynécologiques peuvent toucher toutes les femmes, quelle que soit leur situation personnelle. Pour celles atteintes de maladies neuromusculaires, le dépistage régulier devient encore plus crucial. En effet, ces maladies masquent parfois certains symptômes. Or on sait bien aujourd’hui l’importance de détecter les cancers à un stade le plus précoce possible.
En pratique, on fait comment ?
- Il faut consulter si vous constater un écoulement mammaire, une masse, même indolore, l’apparition d’un creux ou d’une augmentation de volume d’un sein.
- Une mammographie est recommandée tous les deux ans à partir de l’âge de 50 ans, mais certains facteurs (cancers gynécologiques dans la famille par exemple) feront débuter ce dépistage plus tôt.
- Un suivi gynécologique annuel est nécessaire et il ne se résume pas à un examen clinique. Il s’agit aussi d’un moment privilégié pour discuter de nombreux sujets : l’hygiène intime, la sexualité, la contraception, les grossesses, la ménopause, et même l’avortement si nécessaire. Il est fondamental que ces consultations prennent en compte les spécificités de chaque femme, sans jugement, ni présupposés sur son orientation sexuelle ou ses pratiques.
Besoin d’information ou d’une consultation accessible ?
Adressez-vous au service régional AFM-Téléthon de votre région, dans le centre de ressources Intimagir le plus proche de chez vous ou consultez le site www.sante.fr.