Maladies neuromusculaires : une bonne qualité de vie chez les personnes sous ventilation assistée
Une étude réalisée par les équipes de l’AFM-Téléthon montre que la majorité des malades dépendants de la ventilation assistée sont satisfaits de leur qualité de vie. Trois questions à Mathieu Delorme, investigateur principal de cette recherche.
Pourquoi avoir étudié la qualité de vie chez les malades neuromusculaires ventilés ?
Il n’existait pas de données sur la qualité de vie des patients dépendants de leur ventilation à domicile dans les maladies neuromusculaires. Pourtant, au moment où se pose l’indication de la ventilation assistée, les malades nous demandent souvent quel va être l’impact de cette ventilation pour eux au quotidien. Cette question est centrale. Elle a un impact direct sur les stratégies thérapeutiques proposées au patient.
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Nous nous sommes appuyés sur les services régionaux de l’AFM-Téléthon pour contacter plus d’une centaine de personnes avec une atteinte respiratoire sévère et ventilées depuis plusieurs années afin d’évaluer leur qualité de vie. Ce projet a été promu par la Fondations Garches et financé par la Fondation de France et l'AFM-Téléthon.
Quels sont les résultats ?
Malgré la sévérité de l’atteinte respiratoire et l’importance de la dépendance de ces patients vis-à-vis de la ventilation, la qualité de vie qu’ils expriment est bonne, indépendamment de l’âge, du diagnostic ou de l’autonomie respiratoire. Deux tiers des malades jugent avoir une qualité de vie bonne voire excellente et seulement quatre ont déclaré qu’elle était mauvaise.
En tant que soignant, nous avons souvent la perception que la qualité de vie du patient que nous avons en face de nous est forcément moins bonne que la nôtre. Mais nous ne sommes pas en mesure de juger de la qualité de vie d’un autre, quand bien même nous avons beaucoup d’expérience. La seule personne qui peut juger de sa qualité de vie, c’est le patient lui-même.
Avez-vous identifié des facteurs associés à une bonne qualité de vie ?
Le facteur le plus important, c’est l’ancienneté de la ventilation : plus les personnes sont ventilées depuis longtemps, meilleure est leur qualité de vie. Il y a un phénomène d’accoutumance qui fait que l’on va finalement s’adapter à sa situation et avoir une perception de sa qualité de vie qui s’ajuste au fil du temps en fonction de sa situation personnelle, de son entourage, de ses activités...
Un autre facteur important est le mode de vie des patients : ceux qui vivent seul ou en colocation, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas dépendants de leur conjoint ou de leur famille pour les besoins du quotidien, ont une meilleure qualité de vie. Cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas dépendants d’une personne, mais que la charge de soins n’est pas reportée sur un proche. C’est quelque chose qui est significativement et de manière importante associé à une meilleure qualité de vie.
Ce résultat soulève l’importance de l’accompagnement humain et matériel à proposer à ces patients. Si nous arrivons à mettre en place des choses pour que, malgré la dépendance, ils puissent avoir un certain niveau d’autonomie, peut-être que tout le monde le vivrait mieux. Le design de notre étude ne permet pas d’établir un tel lien, mais c’est une piste de réflexion.
Enfin, il est important de noter que les patients ventilés au moyen d'une canule de trachéotomie ne rapportaient pas une moins bonne qualité de vie que les autres.
Sources
Mathieu Delorme est kinésithérapeute respiratoire et chercheur. Il a mené ce projet lors de son doctorat au sein de l’équipe de recherche ERPHAN de l’Université Paris Saclay et de la Direction des Actions Médicales de l’AFM Téléthon.
Quality of life in patients with slowly progressive neuromuscular disorders dependent on mechani-cal ventilation.
Delorme M, Reveillere C, Devaux C et al.
Thorax. 2023 Jan